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Où nous partageons quelques-unes de nos réflexions :

Les défis de la croissance démographique au Canada : perspectives économiques et sociales

En début d'année, l'Economic Club de Toronto a organisé une conférence réunissant six économistes renommés devant un parterre de chefs d'entreprise dans le prestigieux quartier des affaires de la ville. L'objectif : discuter des perspectives économiques de l'année à venir. Le message qu’ils ont adressé au gouvernement fédéral a surpris l’auditoire, habitué à ce genre d’événements : la croissance démographique record du Canada, principalement due à l'immigration, est jugée insoutenable et pourrait être injustifiable. Ces économistes ont mis en doute la possibilité de maintenir ce rythme en 2024. (Source : ici.radio-canada.ca)
Traditionnellement, le secteur financier est perçu comme favorable à l'immigration pour plusieurs raisons. D'une part, elle génère un large bassin de travailleurs, influençant possiblement les salaires à la baisse. D'autre part, chaque nouvel arrivant représente un consommateur potentiel, notamment pour les grandes banques canadiennes, comme le démontrent leurs stratégies publicitaires ciblant cette clientèle.

Une étude menée par l'équipe économique de la Banque Nationale, sous la direction de Stéphane Marion, propose une thèse intrigante. Selon cette dernière, le Canada serait pris dans un « piège démographique », limitant sa capacité à améliorer son niveau de vie. En 2023, la population canadienne a connu une hausse sans précédent de 1 250 000 personnes, suivant une augmentation de 825 000 en 2022. Pour contexte, une telle croissance n'avait été observée que lors de l'annexion de Terre-Neuve. Ce rythme d'augmentation est cinq fois supérieur à la moyenne de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Contrairement à ce que l'on observe aux États-Unis, au Canada, le PIB par habitant stagne, en partie à cause de la pression inflationniste sur le logement. Les auteurs de l'étude soulignent que le Canada ne dispose pas des infrastructures ni du capital nécessaire pour gérer cette croissance démographique.
Opinion publique et immigration

Le graphique ci-haut, qui illustre l’opinion des Canadiens quant à l'immigration, révèle qu'environ un quart d’entre eux estimait que le pays accueillait trop d'immigrants avec un quota de 250 000 résidents permanents. Cette proportion a doublé lorsque le quota de résidents permanents a approché les 500 000.

La grande majorité des Canadiens continue de voir l'immigration sous un jour positif, reconnaissant ses avantages en matière de diversité culturelle, de croissance démographique et de renforcement de la main-d'œuvre. Néanmoins, il existe une préoccupation croissante quant à son impact sur la crise du logement et la pression exercée sur les systèmes de santé et d'éducation. Si le gouvernement fédéral maintient ses cibles en immigration en général et du nombre de résidents permanents pour les prochaines années, qui sont proches d’un demi-million, il est possible que la perception des Canadiens vis-à-vis de l'immigration devienne plus négative. Si nous atteignons ce point de bascule, il sera très difficile de revenir en arrière. Les Canadiens sont ouverts et généreux, mais ils apprécient l’ordre et la mesure. Le gouvernement fédéral gagnerait à démontrer que sur l’immigration, il a une approche mesurée et ordonnée.

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Comprendre la démographie mondiale : enjeux et perspectives

La population terrestre a franchi un seuil historique avec 8 milliards d’individus le 15 novembre 2022, selon l’Organisation des Nations Unies (ONU). Ce jalon remarquable souligne une accélération spectaculaire de la croissance démographique, en particulier depuis le milieu du 20e siècle. Pour mettre ces chiffres en perspective, considérons que l’homo sapiens a environ 300 000 ans et le passage de la condition de chasseur-cueilleur à celle d’agriculteur et d’éleveur, un processus connu sous le nom de Révolution néolithique, a commencé il y a approximativement 10 000 à 12 000 ans. Cette révolution, marquée par l'adoption de l'agriculture, a entraîné une hausse significative des taux de natalité grâce à une meilleure disponibilité alimentaire, ce qui a permis aux communautés humaines de se sédentariser et de soutenir des populations plus importantes. Ainsi, l’humanité a mis presque 12 000 ans pour atteindre le premier milliard en 1804, mais seulement 123 ans pour le deuxième en 1927 et 33 ans pour le troisième en 1960. Finalement, il a seulement pris 11 ans pour passer du septième au huitième milliard en 2022.
Aujourd’hui, nous sommes témoins d’une accélération vertigineuse de la croissance démographique, ce qui soulève des questions cruciales sur les ressources, la durabilité, et les impacts sociaux et environnementaux. En analysant les tendances historiques, on pourrait s’attendre à une explosion démographique dans les prochaines décennies. Toutefois, cette croissance dépend de deux facteurs : la mortalité, la fécondité.

Entre 1960 et 2021, l’espérance de vie mondiale a considérablement augmenté, passant de 50,7 ans à 68,9 ans pour les hommes, et de 54,6 à 73,9 ans pour les femmes. Cette hausse contribue au vieillissement et à la croissance de la population.

Le taux de fécondité (TFR) est le nombre d’enfants qu’une femme en âge de procréer aurait. Voici les taux depuis 1960 :

Un taux de fécondité de 2,1 permet un renouvellement naturel de la population. On constate que le taux mondial est en déclin et s’approche du seuil à partir duquel la population va décliner.

Le taux de fécondité global, en déclin partout, varie considérablement d’une région à l’autre. En Afrique, il demeure au-dessus de 4 dans certains pays, tandis que tous les membres du G20 (sauf l’Indonésie) affichent des taux en dessous du seuil de renouvellement de 2,1.

Projections :
entre croissance et déclin
Selon les Nations Unies, la population mondiale pourrait atteindre 8,5 milliards en 2030, 9,7 milliards en 2050, et 10,4 milliards en 2100. Cependant, des experts, comme l’économiste de la HSBC James Pomeroy, suggèrent que le pic pourrait être atteint en 2043, suivi d’un déclin à 5 milliards d’ici 2100. La baisse de la population chinoise pour la deuxième année consécutive (2 millions d'habitants en moins en 2023 ce qui est le double du déclin de 2022) appuie cette dernière hypothèse. D’ailleurs, la tendance à la baisse du TRF est universelle, lourde et soutenue depuis les 50 dernières années. Les raisons qui la sous-tendent, comme l’urbanisation (exode rural), les femmes qui accèdent davantage à l’éducation et au marché du travail, l’accès et l’éducation à la santé reproductive, les changements de normes sociales sont des changements structuraux qui sont durables. De plus, inverser une tendance à la baisse de la natalité dans une société peu structurée pour accueillir les enfants représente un défi de taille. Autrement dit, un faible TRF contribue à un faible TRF

Historiquement, le débat sur la démographie s’est concentré sur la surpopulation. Toutefois, il est essentiel d’envisager les implications d’une décroissance démographique sur l’économie, les infrastructures, les dettes nationales, le marché immobilier, et les entreprises.

Pour en savoir plus sur le sujet
Nous recommandons « Empty Planet » de Darryl Bricker et John Ibbitson pour une exploration plus approfondie de ces questions vitales ainsi que le compte sur X «@birthgauge qui répertorie les statistiques mondiales sur le sujnet.

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